PSYCHO : Culpabilité des parents d’enfants malades, notamment dans le cas de la drépanocytose

La maladie génétique de leur enfant peut laisser les parents dans un total désarroi.
L’annonce du diagnostic est toujours un moment difficile souvent dans l’atmosphère d’une pièce feutrée. Elle représente toujours un moment d’une extrême violence pour le malade ou les parents du malade.
Souvent, la famille prend cette révélation de manière agressive parce que cela heurte une conception que les parents ont en tête une image qu’ils se sont faite de leur enfant.
Il est conseillé de laisser à chacun le temps d’appréhender avec ses appréciations propres.
Donner un enfant « réussi » à la famille c’est la plus grande fierté des parents. Donc, par l’annonce du diagnostic d’une maladie génétique c’est-à-dire transmise de génération en génération, le couple apprend qu’il vient de briser la chaîne de « bonne santé » de l’arbre généalogique.
De la fascination, certains parents passent au rejet de leur enfant tandis que, pour les autres, le vocabulaire reste le même. GUÉRIR – LUTTER – VAINCRE. L’enfant abîmé doit être réparé à tout prix.

Au sein de l’APIPD, nous accordons un grand espace d’écoute et de parole aux parents d’enfants drépanocytaires.
Beaucoup de nos échanges avec ces derniers sont tournés autour d’un sentiment de culpabilité que ces parents s’imposent : le fait d’avoir mis au monde un enfant malade, le voir souffrir sans avoir la possibilité de prévenir ou d’éviter les crises, se sentir impuissant augmente ce sentiment.
La souffrance de ses parents est palpable et lors de nos échanges certains d’entre-eux expriment avoir l’impression qu’en donnant la vie, ils ont aussi insufflé une mauvaise part d’eux à leur enfant. Certains d’entre eux parlent d’avoir transmis la mort à leur progéniture.

Notons quelques témoignages :

  • « C’est mon sang, mais il n’est pas bon… »
  • « J’ai donné à mon enfant du sang mauvais… »

Parfois d’autres cherchent une explication pour donner un sens à la situation :

  • « On nous punit pour nos ancêtres… »
  • « C’est parce que je n’ai pas fait des choses que mon enfant est malade… »

Il nous est alors essentiel de remettre la maladie au cœur de la parole de l’adulte. Nous faisons ensemble un travail d’éducation vis-à-vis de la drépanocytose et de ses multiples conséquences sur l’organisme. Nous travaillons avec la famille sur l’importance qu’il y a de ne pas se porter coupable ou responsable.
Aussi, nous invitons ces parents à devenir acteurs dans la lutte de leur enfant contre la maladie. Cette attitude leur permet de renforcer le lien intrafamilial, pour faciliter le maintien de l’enfant malade au sein de la famille et ce de la manière la plus bienveillante possible.
L’annonce de la maladie grave, de l’injustice, de l’inacceptable, plonge la famille dans une situation de déni, de repli sur soi, de calfeutrage, donc de refus de communication avec l’extérieur.
Lorsqu’il s’agit d’un très jeune enfant et en particulier quand la famille se vit en « bonne santé » avant le dépistage, l’annonce de la maladie s’accompagne d’incompréhension, de refus d’admettre ce que le médecin révèle, de la difficulté de faire le deuil d’un enfant parfait, plus globalement d’un réaménagement psychologique, familial et social.
Très souvent, certains parents s’adonnent à l’hyper-protection.

  • « Je laisse mon fils faire tout ce qu’il veut car la maladie va bientôt nous le prendre. Il a déjà tellement souffert ! » dit Madame G.
  • « Je le laisse jouer dehors, faire du sport, aller à la piscine… Il faut qu’il vive, comme ça il n’aura rien à regretter. Il aura malgré tout profité de la vie, la sienne va être tellement courte. » ajoute Madame J.
  • « Mon fils me demande de le laisser tranquille. Il dit qu’il n’est pas un bébé ! Que je suis tout le temps après lui : tu as bu, repose-toi, mets un blouson plus chaud, ne cours pas dans la cour, etc… Il a 14 ans et pour moi, c’est encore un petit, je dois veiller sur lui, c’est mon petit canard ! »

Dans ces situations, d’un côté les parents laissent libre cours à leur enfant, en gardant en mémoire l’annonce de la mort annoncée. L’enfant doit profiter de « sa courte vie ». Les parents sont résignés et fatalistes.
D’un autre côté, ils surprotègent l’enfant et refusent de le voir grandir, guettant les moindres gestes jusqu’à « étouffer » celui-ci, peut-être par culpabilité.

La drépanocytose est une maladie génétique transmise par les parents. Ils doivent combler les « lacunes », essayer de se déculpabiliser, de réparer leur faute.
La famille a donc besoin d’un accompagnement afin de faire face à la maladie pour éventuellement, dédramatiser et aussi prendre l’enfant en charge lors d’une crise gérable à la maison.